Atelier critique au lycée Guy de Maupassant de Colombes

Accompagnés par Adrien Dénouette, critique de cinéma, les élèves ont choisi d'écrire sur le film Nayola, de José Miguel Ribeiro. Le film a été visionné dans le cadre d'une journée d'immersion en festival « Image par image » au cinéma Le Figuier Blanc d'Argenteuil le jeudi 9 février 2023.  Atelier de 8h en classe, de janvier à juin.

Le choix de la 2ND 14

Nayola, de José Miguel Ribeiro

23ème Festival du cinéma d’animation du Val d’Oise

Dans les rues sombres d’une ville oppressante se dresse Nayola, au milieu de bâtiments en ruine. Jeune femme à l’esprit indomptable, vêtue d’une combinaison de cuir et chaussée de bottes usées, elle tient tête au chef d’un groupe de soldats armés. Nous sommes en 1995. Son pays, l’Angola, connaît une guerre civile qui l’a privée de son mari, mystérieusement disparu sans laisser de traces. Ce soir-là, c’est l’oppression toute entière que la jeune femme semble défier, fixant de son regard de braise les yeux froids de ce colonel sans expressions. Des décennies plus tard, l’incandescente Yara, sa fille, se retrouve nez à nez avec autre visage inexpressif : un homme fait irruption dans sa chambre, armé d’une machette et masqué d’une tête d’animal…

Naviguant entre le passé de 1995 et le présent de 2011, Nayola, premier film de José Miguel Ribeiro, dépeint une société déchirée entre la vitalité des femmes, victimes d’un régime autoritaire décidé par les hommes, et l’absence ou la brutalité de ces derniers, que signalent leurs visages privés d’émotions. Mobilisant des techniques d’animation traditionnelles, le film se distingue du tout venant de la production contemporaine par son style économe, insistant peut-être sur le caractère intemporel de ce drame partiellement autobiographique, et de sa violence. Comme le précise José Miguel Ribeiro, présent au Festival du film d’animation du Val d’Oise pour présenter son film, le choix de l’animation et de graphismes stylisés ne servent pas une vision enchantée du récit. Cela permet plutôt de représenter ce qu’un film en prise de vues réelle n’aurait pas su montrer. En effet, comment mettre en scène la violence de cette attaque d’avion vrombissante, et du tir de bazooka qui y met fin dans un grand feu d’artifices, sans les libertés de l’animation ?

Contre les conventions actuelles du genre, le film puise ainsi son énergie et sa modernité ailleurs que dans l’animation 3D. A l’image de cette course poursuite tendue, filmée du point de vue de Yara, alors recherchée par des policiers qui ratissent le quartier, Nayola semble par moments emprunter au réalisme des cinématiques de jeu-vidéo, dans le style embarqué des « FPS ». Modernité, aussi, de ce regard lucide porté sur une société où les grands-mères font office de « protecteurs », les filles de « guerriers », et où les hommes font toujours défaut. Ici, les femmes retissent le fil d’une vie mise à mal par les pères, les grands-pères, les soldats. Ce n’est pas la raison première de la réussite du film, laquelle repose avant tout sur l’expression maîtrisée et toujours appropriée de chaque émotion, mais cela contribuait aussi à le sortir brillamment du lot des autres films. 

Texte écrit en commun sur la base des propositions de Alain, Dina, Farba, Kenzo, Leila, Lucas, Mehdi, Paul, Rania et Riwan, élèves de la Seconde 14 , avec l’appui de tous les autres.

enseignant référent : Monsieur Salim REBIAI